Hors-la-loi, son rôle.
Philosophie de la transgression.
De la nécessité du hors-la-loi.
Sans la présence du mal, pas d'humanité possible.
Par déclinaison, sans la présence du « hors-la-loi », pas d'évolution du droit possible.
Révolté par « le scandale du mal » (Paul Ricoeur) l'esprit refuse de comprendre le sens du « transgressant ». Atterré par les horreurs du siècle dernier, la pensée repousse l'étude de cette « force négative ». Pourtant, c'est en créant des interdits (donc des délinquants), que l'espèce humaine s'est définitivement séparée du monde naturel. En s'inventant des tabous, des lois, des morales, l'espèce humaine est « entrée en guerre » contre certains instincts naturels. Elle s'est opposée, par exemple, à la prédation, à la domination, à la thésaurisation des privilèges. Elle s'est opposée à l’affirmation de soi aux dépens de ses congénères.
Résultats des interdits.
En frustrant ces instincts, l'humanité a engendré deux types de comportements :
- celui qui parvient à maîtriser ses tendances devenues illégales afin de se conformer aux interdits et aux lois. C'est la majorité humaine.
- et celui qui, n'y parvenant pas, transgresse les lois ou la morale pour les assouvir.
Cette dernière catégorie se sépare elle-même en deux expressions différentes :
-
le hors la loi (qui transgresse les législations en vigueur).
- le hors morale qui contourne ces lois et utilise ses failles pour parvenir à la même chose tout en restant dans la légalité.
La métamorphose.
primate naturel / homme.
Quel est le but des interdits ?
L'interdit a pour mission de transformer progressivement un primate naturel en un humain conscient. De métamorphoser un animal conditionné à s'affirmer aux dépens de ses congénères, en être absolument respectueux d'autrui.
Pour réussir cette extraordinaire métamorphose, le système des interdits doit évoluer en permanence. Il lui faut combler progressivement toutes ses failles éducatives, morales et législatives. Des failles, révélées par les délinquants et les hors-la-loi.
Autrement dit, le hors-la-loi est un des acteurs fondamentaux pour l'évolution du droit, de la loi, de la morale humaine. Et tant que la loi, le droit, l'éducation, la répression et la punition, n'auront pas atteint leur perfection, les hors-la-loi et les transgressants seront nécessaires à la progression de ces notions.
Si, par exemple, le système pénitentiaire avait atteint sa perfection, aucun délinquant, à l'expiration de sa peine, ne récidiverait. La récidive n'est pas un problème de délinquant, mais un problème de société. Le système pénitentiaire tel qu'il est pratiqué aujourd'hui dans le monde, y compris en Occident, est incapable de ramener un individu dans le droit chemin, de lui permettre d'utiliser son potentiel à des fins positives pour la société et pour lui-même. Les qualités organisationnelles et l'intelligence d'un chef de gangs ou d’un patron de mafia, capable d'établir un commerce de drogue intercontinental, n'ont rien à envier à celles d’un patron du CAC40. Seulement, l'un utilise ses talents au détriment de la société humaine (et finalement à son propre détriment) et l'autre, en principe, à son avantage.
Visiblement, la transgression est encore nécessaire a l'évolution et l'humanité n'a pas encore atteint un haut niveau de perfection.
Cette analyse révèle plusieurs choses.
D'autre part, il n'est pas nécessaire d'être « hors-la-loi » pour maltraiter ses congénères.
Un homme peut en effet tyranniser autrui tout en restant dans le cadre de la loi.
C'est le cas, par ex, des gouvernements démocratiques mais manipulateurs qui s'arrangent pour éditer des lois élitistes et défavorables au peuple. C'est le cas des employeurs payants leur personnel au « plus bas salaire légal » tout en sachant qu'ils les placent ainsi dans un état de servitude et d'esclavage. C'est le cas encore des très riches détournant la tête devant la misère. En somme, c'est le cas de toutes les transgressions morales légales, perpétrées depuis l'origine des sociétés par certains dominants envers le peuple et plus globalement par certains sur d'autres.
En sommes, peut-être jugé « transgresseur », tout
individu brisant les grandes règles universelles de l'humanité, qu'elles soient morales, éthiques ou civiles. Autrement dit, tout individu ne s'appliquant pas à lui-même la sentence de Kant : "Agis de telle sorte que la maxime de ta volonté puisse être érigée en loi universelle". Et à la lecture d'une tel maxime, une évidence s'impose : nous sommes tous des transgresseurs.
Comprendre le mal pour le soigner.
"Pourquoi punir un coupable quand il n'y a plus aucun bien à tirer de son châtiment ?".I Ching
Révéler le côté fondamental du mal et du hors-la-loi, est devenu une nécessité. Ce regard nous permettra de passer à un traitement beaucoup plus doux et bienveillant du délinquant (comme les sociétés scandinaves l'ont déjà compris). Il favorisera également la compréhension de notre évolution et sa logique.
Mais, comprendre le sens de la présence du mal, n'astreint pas de le tolérer ou de le protéger.
Car même si le « mal », sous un certain aspect, est un des moteurs de l'évolution du « bien », même s'il est indispensable au progrès du droit, sa présence doit continuer à nous être insupportable. D'un autre côté, cette nature « indispensable » nous oblige quand même à l'analyser en profondeur pour agir le plus efficacement possible contre lui.
Par exemple, si nous voulons éviter les récidives, nous devons comprendre les causes de la transgression et les répercussions des châtiments que l'on impose. Nous devons cesser de mettre toute notre énergie sur les effets sans nous occuper réellement des causes.
Il est donc nécessaire, si notre humanité veut devenir consciente, de déchiffrer tous les mécanismes conduisant un individu à abuser ses semblables.
2001.
les lois.
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