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Herbert Spencer

Sur l'évolution

Le philosophe Anglais Herbert Spencer

Herbert Spencer

Quiconque hésite à proclamer ce qu’il pense être la plus haute vérité, de peur qu’elle soit en avance sur son temps, peut se rassurer en considérant ses actes d’un point de vue impersonnel. Qu’il se souvienne que l’opinion est le moyen par lequel le caractère adapte à lui-même les changements extérieurs, et que son opinion à lui fait partie de ce moyen à juste titre – Elle est une unité de force qui constitue avec d’autres unités du même genre la puissance générale qui produit les changements sociaux, et il comprendra qu’il peut formuler ses convictions les plus intimes, en leur laissant produire tel effet qu’il se pourra. Ce n’est pas pour rien qu’il trouve en lui-même cette sympathie pour certains principes et cette répugnance pour d’autres. Lui-même, avec toutes ses facultés, ses aspirations et ses croyances, n’est pas un accident mais un produit de l’époque. Héritier du passé, il est en même temps créateur de l’avenir, et ses pensées sont comme des enfants qui lui serait né et qu’il n’a pas le droit de laisser mourir faute de soins. Il peut avec raison, comme n’importe quel autre être humain, se considérer comme un des innombrables agents au service de la Cause Inconnue ; et lorsque la Cause Inconnue fait naître en lui une certaine croyance, il est par là même autorisé à la professer et à y conformer ses actes … l’homme sage ne considérera donc pas la foi qui est en lui comme chose adventice. La haute vérité qu’il voit, il la proclamera sans peur ; sachant bien que, quoi qu’il arrive, il remplit dans la vie son véritable rôle – sachant que s’il peut effectuer le changement qu’il a en vue ce sera bien ; sinon, ce sera bien quand même ; quoique  moins bien.

(...)

Lorsqu’en 1858 il révisait ses essais en vue d’une publication collective, il fut frappé par l’unité et la cohérence des idées qu’il avait exprimé ; Et la pensée lui vint aussitôt, telle un rayon de soleil qui pénètre par une porte ouverte, que la théorie de l’évolution pouvait s’appliquer à toutes les sciences aussi bien qu’à la biologie ; qu’elle pouvait expliquer non seulement les espèces et les genres, mais les planètes et les couches terrestres, l’histoire sociale et politique, les conceptions morales et esthétiques. Il projeta toute une série d’ouvrage où il montrerait l’évolution de la matière et de l’esprit depuis la nébuleuse jusqu’à l’homme, et de l’homme sauvage jusqu’à Shakespeare. Mais il désespéra presque, en songeant qu’il avait près de 40 ans. Comment un homme de cet âge et de santé débile pourrait-il avant de mourir, parcourir à lui seul tout le chant des connaissances humaines (...)

Il savait qu’il ne recouvrerait jamais la santé et qu’il ne pouvait travailler plus d’une heure de suite. (...)

À cause de la fameuse « première partie » qui s’efforçait de réconcilier la science et la religion, et mécontenta à la fois les évêques et les savants. Le rôle de pacificateur est difficile.

Ce triomphe de l’esprit et de la volonté sur la maladie et sur des obstacles sans nombre est une des radieuses pages du livre de l’humanité.

« Nous oublions trop souvent », dit Spencer dès le début, « que non seulement il y a une âme de bonté  dans les choses mauvaises, mais généralement aussi une âme de vérité dans toute erreur ».

 

Ce qu’il découvre de suite, c’est que toutes les théories sur les origines de l’univers nous amène à des hypothèses inconcevables. L’athée essais de penser un monde existant soi, sans cause première et sans commencement ; mais nous ne pouvons rien concevoir qui n’ait une cause est un commencement. Le théiste ne fait que reculer la difficulté ; et au théologien qui déclare ; « c’est Dieu qui a créé le monde » s’adresse la question sans réplique de l’enfant : « qui a créé Dieu ? » Toutes les idées dernières de la religion sont logiquement inconcevables.

(...)

La seule philosophie honnête, pour employer l’expression de Huxley, c’est l’agnosticisme (...)

La cause commune de toutes ces obscurité et la relativité de toute connaissance. « Penser consistant à établir des rapports, aucune pensée ne peut exprimer autre chose que des relations. L’intelligence n’étant construite que par et pour les rapports avec les phénomènes nous entraîne dans l’absurde, quand nous essayons de l’utiliser pour quelque chose qui dépasse le phénomène».

Et, cependant, le relatif et le phénoménal implique de par leur nom et leur nature quelque chose au-delà d’eux, quelque chose d’ultime et d’absolu.

« en examinant nos pensées nous voyons combien il est impossible de se débarrasser de la conscience d’une Réalité cachée derrière les Apparences, et comment, par suite de cette impossibilité même, s’établit notre foi indestructible dans cette Réalité ».
Mais ce qu’est cette Réalité nous ne pouvons pas le savoir. De ce point de vue la réconciliation de la science et de la religion n’est plus très facile.
« La vérité se trouve généralement dans la coordination des opinions contraires ».

-Que la science admette « que ses lois ne s’appliquent qu’au phénomène et au relatif ;
- que la religion admette que sa théologie est un mythe inventé pour légitimer une croyance qui défie la conception.

-Que la religion cesse de représenter l’Absolu comme un homme magnifié ; pis encore, comme un monstre cruel et sanguinaire, plein de traîtrise, tourmenté par un « amour de l’adulation tel qu’il susciterait le mépris, s’il se rencontrait chez une créature humaine».
-Que la science cesse de nier la divinité, ou de considérer le matérialisme comme un fait acquis.

L’esprit et la matière sont tous deux des phénomènes relatifs, le double effet d’une cause dernière dont la nature doit rester inconnue. La reconnaissance de cette puissance insondable est la vérité centrale de toute religion est le point de départ de toute philosophie. (…)

L’accroissement du pouvoir de l’Etat diminue la liberté des individus ; mais dans le même temps elle confère aux parties une interdépendance, un tissu protecteur de relations, qui constituent la « cohérence » et favorise la survivance du groupe. Tout ce qui se passe de la diffusion à l’intégration et à l’unité, Enfin et inévitablement, l’ « équilibre » se réalise. (...)

Comme des races qui se meurent, nous penserons au Ciel comme un lieu de repos et non de vie ; nous rêverons de Nirvana. (...)

Les sociétés se désagrégeront, les masses émigreront, les cités s’évanouiront dans le sombre hinterland de la vie paysanne ; aucun gouvernement ne sera assez puissant pour maintenir ensemble les parties relâchées ; on ne se souviendra même plus de l’ordre social.

(...)

Et chez l’individu pareillement l’intégration finira par se rompre, et cette coordination qui est la vie disparaîtra dans ce désordre et cette dispersion qui est la mort. La terre sera le théâtre chaotique de la décomposition, du sombre drame de l’ énergie en dégradation irrévocable ; et elle retournera elle-même à la poussière et à la nébuleuse d’où elle est sortie. Le cycle de l’ évolution et de la dissolution sera complet. Ce cycle recommencera encore et sans cesse, à l’infini, mais le dénouement sera toujours le même. La vie porte au front le Mémento mori ; toute naissance est un prélude à la dissolution et à la mort.

Les « premiers principes » sont un drame magnifique qui raconte avec un calme presque classique l’histoire de l’élévation et de la chute, de l’évolution et de la dissolution des planètes, de la vie, et de l’humanité. Mais c’est un drame tragique dont le mot de Hamlet formerait l’épilogue le plus approprié : « tout le reste est silence.»

Peut-on s'étonner que dommes et des femmes nourris de foi et d'espérance se soient révoltés contre ce résumé de l'existence ?
Nous savons bien qu'il faut mourir, mais comme le lendemain pourvoira à lui-même, nous préférons penser à la vie.

Il y avait chez Spencer un sentiment presque semblable à celui de Schopenhauer de la futilité de l’effort humain. À la fin de sa carrière glorieuse il déclara que, pour lui, la vie ne valait pas la peine d’être vécue. Il avait la maladie du philosophe :  Il voyait les choses de si loin que les côtés plaisants et les couleurs chatoyantes de l’existence lui échappaient.

Spencer se rendait compte qu’on ne pouvait accueillir avec faveur un système philosophique dont le dernier mot n’était pas Dieu et le
Ciel, mais équilibre et dissolution ; et en terminant cette première partie il défendait avec une éloquence et une ferveur peu ordinaire son droit de proclamer les dures vérités dont il avait conscience.

extrait de : vies et doctrines des philosophes de Will Durant (payot 1938)

24/12/2021

Condillac

 

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"La vérité se trouve généralement dans la coordination des opinions contraires".

"En examinant nos pensées, nous voyons combien il est impossible de nous débarrasser de la conscience d'une Réalité cachée derrière les apparences, et comment, par suite de cette impossibilité même, s'établit notre foi indestructible dans cette réalité".

Herbert Spencer