La norme et le matérialisme
L'exemple de la trisomie
Qui a le droit de juger « anormale » la trisomie ?
Plus l'amour est parfait, plus la folie est grande et le bonheur sensible. Erasme
Parfois des normes, des conventions, s'imposent dans l'humanité sans qu'on en vérifie la pertinence. C'est, me semble-t-il, le cas sur le regard porté à la trisomie 21. Telle qu'elle se comporte actuellement, la médecine semble placer cette forme d'exister du côté du « non conformes*».
*Donc du côté du mal comme l'entend Hegel (la non-conformité entre ce qui devrait être et ce qui est réellement).
C'est du moins l'image qu'elle montre, lorsqu'elle préconise indirectement la suppression de cette forme d'exister. Lorsqu'elle propose de détecter cette « anomalie » dans le ventre de la mère et d'en proposer l'interruption*
*une médecine consciente du rôle du trisomique au sein de la société humaine, militerait ardemment pour la préservation de leur existence et pour leur bonne intégration dans la communauté. Et l'avortement ne serait plus systématique, mais marginal.
Ce point de vue arbitraire n'est évidemment pas propre à la médecine. Celle-ci reprend simplement une façon ordinaire de concevoir le trisomique comme « anormal » « mal formé ».
La science doit ouvrir sa conscience
Nous aurions aimé de la part d'une corporation réputée censée, une réflexion éthique à ce sujet. Un peu de méditation avant de proposer systématiquement le dépistage d'une forme d'existence sortant de l'ordinaire. Ce manque de réflexion nous place malheureusement, en présence d'un véritable eugénisme soft. Les bienfaits de la médecine sont incontestables. Elle doit également bénéficier d'un maximum de liberté*.
*dans la
mesure où elle ne déborde pas sa philosophie ni son éthique.
Mais elle est critiquable lorsqu'elle adopte les points de vue vulgaires du marché. Lorsqu'elle souscrit aux standards des pires utilitarismes à propos de la normalité mentale et physique.
L'eugénisme inconscient
Heureux les simples d'esprit...
L'utilitarisme mercantile
L'ultralibéralisme a plongé l'humanité dans une phase de mercantilisme forcené. Rares sont les pans de la société échappant à son emprise. Dans ce modèle, tout doit être productif y compris les êtres humains. Par déclinaison, tout ce qu'il juge improductif est méprisé. Utilisant le mode pyramidal*, cet état d'esprit insémine la plupart des corps de métier. Y compris ceux dont l'éthique est incompatible avec la prééminence de la rentabilité sur l'être humain.
* en transformant d'abord l'état d'esprit des dirigeants, des responsables, des meneurs d'hommes. Ces leaders ont ensuite imposé, les valeurs du marché à l'ensemble de leurs employés.
Emportés par la foule
Cette offensive éclair touche donc aussi les corporations relatives à la santé. Elle les sortent des rives de l'être pour celles de l'avoir et du rendement. C'est en tout cas le sentiment renvoyé quand on déchiffre la symbolique de certains de ses actes.
Les valeurs du marché contraignent à mépriser une partie du genre humain. La partie qu'il présente comme « inutile » et « improductive ». Qu'il donne à percevoir comme un handicap pour la famille ou la société. Soumis au brouhaha du marché, le milieu médical, adopte inconsciemment ces valeurs.
Un mécanisme inconscient
Il n'y a aucune perversion dans cela. C'est un simple mécanisme qu'impose intuitivement le marché. Pour vendre plus et prescrire ses règles, il utilise le stress et la tentation. Il noie la société dans l'agitation et le désir permanente. Il plonge l'homme dans une masse de bruits, de cris et d'objets. une profusion de sexe, de jeux, d'attentes futiles, de rires, de tensions et d'hyperactivité. Ce brouhaha s'auto alimente et s'auto accélère (son hypnotiseur favori, bien entendu, c'est la télé).
Un processus machinal
L'homme ainsi conditionné, ne peut plus utiliser correctement sa conscience. Plongé dans cet affolement, l'homme ne voit pas qu'il est devenu un simple objet consommateur. Vampirisé par le marché, il passe à côté de son existence (mais les acteurs du marché, aussi). Le consommateur ne fait plus que consommer et le travailleur, travailler. Soumis à ce régime stressant, le citoyen ne peut plus distinguer les manipulations mercantiles ou politiques. L'esprit social, l'esprit critique et la conscience morale* se retrouvent étouffés
*du marché comme celle du consommateur.
Ce mécanisme bien entendu est ponctuel. Sa nature inconsciente et forcenée, le conduit naturellement à dépasser les limites du soutenable. Ses deux destins, sont l'accident ou le renversement.
De « l'intérêt » du « non conforme »
Pour l'ultra libéralisme donc, certains êtres humains sont inutiles. Notons au passage la similitude de cet état d'esprit avec celui des dictatures.
Nous nous opposons bien entendu à ce point de vue. Pour la mecaniqueuniverselle par exemple, la trisomie 21, est très importante pour l'humanité. Ses membres font justement parti des grands résistants à l'ultralibéralisme. Plus proche des valeurs de l'être, ils sont peu vulnérables aux sirènes du marché*.
* la mode, l'apparence, la sublimation musculaire du corps etc.
Ces êtres simples se désintéressent des pulsions primaires (pouvoir, domination, accumulation de richesses, etc.).
Un angle de vue à réinvestir
Le milieu médical doit réinvestir sa vision éthique et humaniste. Elle pourra comprendre alors toute l'importance du simple d'esprit et du naïf pour l'humanité. Les trisomiques ne sont pas « de trop » dans la société, c'est l'indifférence qui l'est. C'est la lenteur à changer notre regard sur eux. C'est notre lenteur à donner les moyens aux familles d'accueillir ces enfants différents et extraordinaires.
Stressé par le système, la science accuse de plus en plus d'indifférence et d'inconscience. Elle s'est isolée du monde spirituel pour qui le simple d'esprit est un messager de dieu.
eugénisme
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